La fin des temps .

Sur notre planète, il y aurait actuellement environ 3000 milliards d'arbres, soit 400 arbres pour un humain. En France métropolitaine, beaucoup d'arbres sont mal en point, voire morts : les manques d'eau provoquent chez eux des sortes de thromboses (des bulles se forment dans les canaux où se déplace la sève, coupant sa circulation) qui tuent tout ou partie de leur frondaison. Avec les changements climatiques, des parasites se déplacent dans des régions dont ils étaient absents auparavant, où les arbres n'ont pas encore de stratégies de défense contre eux, et où les prédateurs de ces parasites ne sont pas encore arrivés, ou ignorent que ces parasites pourraient figurer à leur tableau de chasse. Résultat : dans le grand-est, on constate la maladie ou la mort d'un tiers des arbres de nos forêts (chênes, hêtres, épicéas et sapins sont très touchés) ! Les autres régions sont également concernées. Les châtaigners sont décimés par le cynips dans le sud-ouest, le buis est infesté par la pyrale, des chenilles processionnaires se multiplient... Les arbres finiront par suivre les évolutions climatiques, et leurs zones de prédilections seront plus au nord, ou plus en altitude. Mais leurs racines sont dans le sol, et ce sont seulement leurs graines qui pourront se déplacer, lentement, décennie après décennie, alors que les parasites et les maladies se déplacent bien plus vite. Nous pourrions les aider, mais il faudrait déjà stopper la progression des villes, des routes, des bétonnages et goudronnages qui mangent peu à peu ce qui reste de terres cultivables et de friches.

Des zones de la planète vont se désertifier, des forêts vont laisser place à des savanes, des prairies, des garrigues... Mais des déserts (de sable, de glace...) pourraient aussi se mettre à verdir, voire à s'enforester. L'augmentation de la teneur atmosphérique en gaz carbonique est une aubaine pour la végétation et les arbres, qui pourront croître davantage là où le sol et le climat le permettront. Une fois en place, les arbres modifieront le climat local (en période de canicule, passez sous des tilleuls, ou dans des endroits envahis par du lierre ; attention à ne pas y attraper froid !), et favoriseront l'apparition de sources et de cours d'eau.

Depuis des décennies, les viticulteurs notent le déplacement des cépages : le syrah des Côtes-du-Rhône remonte vers le Beaujolais. Les grandes maisons de champagne ont acheté des terrains en Grande-Bretagne et en Suède, pour y faire prospérer leurs vignes dans des climats favorables dans quelques décennies. Les vins de Bordeaux tendent à se rapprocher du Porto (teneurs en sucres et en alcool en hausse).

Le monde que nous avons connu change de visage, et va devenir moins hospitalier, plus violent. La raréfaction de l'eau potable, la baisse de productivité agricole, les températures plus étouffantes en été et plus froides en hiver, les épidémies vont conduire à une diminution de la population mondiale. Pablo Servigne parle de 500 millions de terriens en 2100. On doit déjà pouvoir voir l'espérance de vie décliner. Cette description peut paraître catastrophiste, mais il s'agit juste de modifications profondes de notre lieu de vie, et je reçois cet état de fait comme une aventure à vivre. Et avec l'ingénieur agronome et franciscain Hervé Covès, je vais lancer : "la vie est belle !"