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| FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE | |
| | Auteur | Message |
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Dogiraudet Etudiant
Nombre de messages : 493 Age : 69 Localisation : région parisienne Date d'inscription : 18/03/2012
| Sujet: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 10:12 | |
| - Spoiler:
Un article intéressant sur ce sujet . Lien : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
- la charte a écrit:
- les liens, illustrations, vidéos, etc. ne constituent pas une argumentation. Ils ne peuvent être postés sans résumé de leur contenu.
Veuillez adjoindre un résumé de l'article en question ou du moins un résumé significatif.
Sentinelle. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 11:42 | |
| lu en diagonale, en effet il a l'air assez pertinent. Peux tu expliquer pourquoi tu as choisi de le poster ? Quels sont les infos qui t'ont accrochées ?
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Une fois encore, je trouve tellement réducteur de le réduire à "une méthode pour acquérir le bonheur" alors que son but est de se libérer des souffrances évitables: émotions destructrices, traumatisme ou illusions qui déforment la réalité. Le but n'est pas d'être heureux, mais d'être compassionné, lucide, efficace, conscient.
Et quand on est conscient et lucide, on connaît la souffrance des autres.
La preuve est qu'il décrit notre vie sur terre comme un endroit où la souffrance est inévitable et permanente. Même si on fait partie des favorisés, sur cette terre, qui peuvent arriver à dire "je suis heureux", comment-peuvent ils l'être à côté de tous ceux qui souffrent encore ??? Il y a même un stade où la plus grande souffrance est de voir les autres souffrir, et dans le monde, il n'en manque pas !!! C'est un stade qu'il faut aussi pouvoir dépasser pour voir clair et voir quelle est la méthode la plus efficace pour les aider... et ça va très loin. C'est à ma connaissance, la Voie la plus efficace pour aller dans cette direction. Les religions se contentent de proposer de "gagner son ciel", notamment par l'altruisme, mais cela dérive facilement en altruisme "intéressé" (pas toujours!). On le fait "pour gagner son ciel", donc c'est un but égoïste. On se donne bonne conscience même si nos actions son mal ciblées. Et souvent, elles le sont, justement parce que le but n'est pas "juste". Exemple caricatural: en visite dans un pays pauvre, on donne de l'argent aux mendiants et en les choisissant mal, on encourage les organisations mafieuses qui vont jusqu'à rendre des enfants infirmes pour simuler la pitié. Il vaut mieux donner cet argent pour l'éducation, les soins...
La psychanalyse classique a un but retreint, centré sur une seule personne. Elle soigne un bobo mais ne va pas plus loin. Depuis quelques dizaines d'années, elle étudie la pratique bouddhiste avec la plus grande attention et intègre de plus en plus de ses principes. L'avantage est qu'on sort de l'aspect folklorique et superstitieux qui est souvent l'image qui "colle" aux multiples formes des bouddhismes. Ce aspect folklorique est d'ailleurs aussi un obstacle qu'il faut très vite dépasser pour se centrer sur l'enseignement de base et ne pas se perdre dans les milliers de variantes, écoles, lignées... |
| | | Dogiraudet Etudiant
Nombre de messages : 493 Age : 69 Localisation : région parisienne Date d'inscription : 18/03/2012
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 12:36 | |
| Merci Triskell . J'ai posté ce témoignage étonnant car je trouve à quel point il révèle la complexité intérieure de l'etre humain . Son parcours personnel inhabituel révèle une évolution personnelle en constante transformation , il montre aussi l'impermanence des différents états mentaux et psychologiques qui nous traversent en cela il confirme les intuitions fortes du bouddhisme à ce sujet . Evidemment cette impermanence générale qui caractérise l'homme ou tout se transforme inévitablement au fil du temps tant sur le plan corporel que mental et affectif , tout cela induit de multiples questionnements , à ces questionnements tentent de répondre la psychanalyse ,le bouddhisme et la phénomènologie , dans quelles mesures ces importants courants de pensée arrivent-ils à répondre de façon pertinente face à cette immense complexité humaine ? Je pense que c'est à chacun dans son cheminement particulier d'essayer d'y répondre si cela l'intéresse . | |
| | | bluenote Exégète
Nombre de messages : 3164 Age : 49 Localisation : France Date d'inscription : 27/05/2018
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 19:03 | |
| Il y a une différence entre bouddhisme et psychanalyse. Le bouddhisme repose sur des croyances, et la psychanalyse sur des méthodes et résultats qui se veulent rationnels. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 19:06 | |
| Il n'y a aucune croyance en bouddhisme. C'est fou tous ces gens qui parlent du bouddhisme sans en connaître même les bases...
Voilà un des textes fondateurs, extrait des "dits de Bouddha" qui sont sans doute les plus proches de l'enseignement de Sakkyamuni. C'est ce texte qui m'a décidé à m'engager dans cette Voie et tout l'enseignement que je suis depuis plus de 30 ans va dans ce sens.
Le Kalama suttra :
Le Bouddha dit aux habitants du village de Kalama : “Ne croyez pas sur la foi des traditions quoiqu’elles soient en honneur depuis de nombreuses générations et en beaucoup d’endroits ; ne croyez pas une chose parce que beaucoup en parlent ; ne croyez pas sur la foi des sages des temps passés ; ne croyez pas ce que vous vous êtes imaginé, pensant qu’un dieu vous l’a inspiré. Ne croyez RIEN sur la seule autorité de vos maîtres ou des prêtres. Après examen, croyez ce que vous-même aurez expérimenté et reconnu raisonnable, qui sera conforme à votre bien et à celui des autres.”
On se retrouve donc avec ce que tu dis de la psychanalyse, mais je trouve leur approche beaucoup plus efficace et pertinente. La psychanalyse s'est longtemps basé sur des postulats erronés (Freud et Cie).
Dernière édition par Triskel le Jeu 30 Mar 2023 - 8:56, édité 1 fois |
| | | bluenote Exégète
Nombre de messages : 3164 Age : 49 Localisation : France Date d'inscription : 27/05/2018
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 19:20 | |
| On connait des gens qui ont expérimenté la réincarnation ? .. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Mer 29 Mar 2023 - 19:28 | |
| c'est un autre sujet, - (suite:
il ne faut pas confondre hindouisme et bouddhisme, même si les deux sont souvent mélangés... par des ignorants, d'abord: en extrême orient.
Lien : la réponse d'un grand maître
Dernière édition par Triskel le Jeu 30 Mar 2023 - 8:55, édité 1 fois |
| | | alex_x Professeur
Nombre de messages : 704 Age : 47 Localisation : Québec Date d'inscription : 16/02/2023
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Jeu 30 Mar 2023 - 2:28 | |
| Triskel, nous avons nos différents sur certains points, j'aime te lire sur le bouddhisme ou sur la psychologie. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Jeu 30 Mar 2023 - 7:29 | |
| avec plaisir Alex, mais je pense que d'abord on ne devrait pas dire "LE bouddhisme", mais LES bouddhismes" sinon on n'en sortira pas. Il y a des centaines, voire des milliers de différents bouddhismes.
Comme il n'y a ni croyances imposées et que partout où il s'est implanté, il s'est mélangé aux croyances locales, surtout en Inde où il a été fondé, il a de multiples variantes qui vont d'un extrême à l'autre dans tous les sens. Et c'est le bouddhisme "hindou" qui s'est d'abord répandu chez nous via quelques livres d'auteurs qui n'avaient pas pratiqué et ont mal traduit les mots employés dans les textes. La pratique est en effet essentielle pour comprendre l'enseignement et surtout "l'expérimenter", par exemple le principe de l'impermanence est compris en 5 secondes par le raisonnement, mais il faut des années de pratique pour le comprendre vraiment et l'avoir intégré dans son mode de vie. Actuellement, après la mode "zen", c'est la mode "tibétaine" à cause de tous les lamas qui ont été chassés du Tibet et se sont installés dans le monde entier.
Celui que je pratique est celui de Siddharta (le fondateur, celui représenté par la statue classique), du Dalaï Lama actuel qui a toujours refusé de dire qu'il était une ré-incarnation et a aboli le système qui l'a élu (j'ai assisté à plusieurs enseignement dont un de 5 jours full time avec lui, cette question ressort à chaque fois), de Tich Nath Tan, un grand maître zen et Taisen Deshimaru (idem), de tous mes enseignants sans exception: des lamas tibétains formés au Tibet avant l'invasion chinoise, et de Alexandra David Néél, une des premières à en parler en Europe, qui a vécu des années là bas, notamment une retraite de 3 ans, 3 mois, 3 jours dans une grotte avec un vieux maître. Elle est donc aussi "lama".
Les autres formes de bouddhismes de m'intéressent pas et je connais même pas leur nom ou la taille de leur "véhicule". Mes enseignants reconnaissent qu'il existe de nombreuses croyances "parasites" et comme il n'y a pas de croyances imposées, il n'y a pas non plus de croyances interdites. Tous est laissé à l'appréciation de chacun: certains en ont besoin. C'est aussi pour cela que la pratique bouddhiste peut se superposer à n'importe quelle religion ou croyance. C'est un entraînement de l'esprit, pas une religion.
Je n'irai pas non plus dans le domaine de la psychologie, domaine où je suis nulle...
Dernière édition par Triskel le Jeu 30 Mar 2023 - 9:19, édité 1 fois |
| | | Dogiraudet Etudiant
Nombre de messages : 493 Age : 69 Localisation : région parisienne Date d'inscription : 18/03/2012
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Jeu 30 Mar 2023 - 8:51 | |
| Voici le texte de l'article dans son entièreté :
Freud et le Bouddha, le face-à-face
Le psychanalyste lausannois Eric Vartzbed, ancien mécanicien et champion de motocross, se livre à une analyse comparée de deux voies très fréquentées dans la quête du bonheur. Un vrai délice d’intelligence et de liberté d’esprit.
JPEG - 18.6 ko Eric Vartzbed. (Eddy Mottaz) Quels sont les points communs entre le zen et la psychanalyse ? On vous l’accorde, la question ne s’impose pas comme des plus urgentes. Pourtant, en lisant l’élégant ouvrage1 du psychothérapeute et psychanalyste lausannois Eric Vartzbed, on se rend compte qu’on se trouve au cœur d’une préoccupation très contemporaine – comment être heureux ? Et que le divan comme le bouddhisme sont des voies très fréquentées pour y répondre. Sur l’une et l’autre, Eric Vartzbed propose un regard plongeant extraordinairement éclairant, car il permet de discerner des ressorts qui demeurent, de trop près, invisibles.
La prise de distance, le voyage, c’est toute l’affaire de ce jeune docteur de 37 ans, qui a commencé par être pilote de motocross avant d’effectuer un virage biographique radical. Et qui trouve merveilleusement les mots pour dire qu’il faut se méfier des mots.
Le Temps : Un des livres cultes des années 70 s’intitule « Traité du zen et de l’entretien des motocyclettes » 2. Mais le lien entre le zen et la moto reste obscur. Vous qui avez été champion de motocross, vous allez enfin pouvoir nous éclairer ?
Eric Vartzbed : Désolé ! La seule relation que je peux établir entre la moto et le bouddhisme est très personnelle, c’est l’idée de réincarnation : je peux dire que j’ai eu plusieurs vies ! (Il rit) Dans la première, j’ai fait de la moto, très tôt, dès 14 ans, pour faire comme mon grand frère. Puis comme mon père, qui était mécanicien. Ma première formation est un CFC de mécanicien.
– Comment avez-vous viré psychanalyste ?
– Certaines rencontres réorganisent l’existence. Je suis tombé amoureux. J’avais 17 ans, mon amie était gymnasienne, et son père un grand historien de l’art. Elle m’a déniaisé érotiquement, et lui intellectuellement. J’ai fait le gymnase du soir, puis un doctorat en psychologie sur les racines philosophiques de la psychanalyse. Mais, si je suis devenu psychanalyste, c’est aussi parce que j’ai eu personnellement besoin d’une cure et que j’en ai fait l’expérience.
– Dans votre livre, vous parlez aussi du bouddhisme comme d’une « cure ». Est-ce cela qui vous a amené à vous y intéresser ?
– Oui, je cherchais un point de vue extérieur sur ma discipline, pour éviter de réciter un catéchisme freudo-lacanien. L’aspect le plus intéressant du bouddhisme, à mon avis, est qu’il propose une méthode pour guérir la souffrance humaine. C’est une démarche très empirique, où il ne s’agit pas de croire, mais de faire des expériences.
– Tout de même : la réincarnation, la spiritualité ?
– Au cœur du bouddhisme, il y a la méditation. Face aux spéculations sur l’au-delà, le Bouddha répondait par un noble silence.
– Le zen suppose de « renoncer au sacré », écrivez-vous : on est à l’opposé de la religion ?
– Très loin, oui. Le chrétien traite sa souffrance par l’imaginaire et le sens, l’identification au Dieu incarné qui dépasse sa souffrance dans la résurrection. La thérapeutique bouddhiste propose au contraire de se dégager de tout sens, de toute croyance, de toute idéologie. De tout ce qui, en fait, relève de la représentation. L’idée est de libérer la perception, d’être simplement en contact avec ce qui est. C’est ce que j’appelle un scepticisme sensualiste. Finalement, on a davantage affaire à une hygiène qu’à une religion. C’est ma vision des choses bien sûr. Mais elle est étayée. Publicité
– La quête de sens n’est-elle pas aussi au centre de la cure psychanalytique ? Qu’est-ce qui vous fait dire que la psychanalyse, comme le zen, vise à s’en détacher ?
– Il y a des étapes dans une analyse. Mais le but est bien d’arriver à décoller de son fantasme, à se libérer de la croyance que l’on s’est forgée sur ce qu’il faut être, à ne plus être figé dans une représentation. Il y a des moments magnifiques dans une cure. Lorsque ce décollement opère, c’est un peu comme dans Les Ailes du désir, le film de Wim Wenders : on passe du noir et blanc à la couleur, le vivant circule à nouveau. La grande différence avec le zen, c’est que ce décollement s’opère ici grâce au langage plutôt que grâce à la méditation.
– Ce qui n’empêche pas l’analyste de mettre fin, quand il le faut, au « bavardage mental »…
– Oui, car on peut faire mousser indéfiniment la machine du sens. A un moment donné, l’analyste peut intervenir pour arrêter l’éternel jeu des questions et des réponses. Les réponses tautologiques du maître zen ont la même fonction.
– Si je suis « zen », sans désir ni idéal, qu’est-ce qui fait que je me lève le matin ?
– Vous avez raison, on ne peut pas vivre sans idéal. D’ailleurs, le zen surfe sur un paradoxe : il critique les idéaux mais il en constitue un lui-même. L’enjeu est probablement de vivre avec sans trop y adhérer. Dans les deux traditions, le malaise tient aux fixations.
– Parlez-nous du bonheur selon le Bouddha et selon Freud.
– On a affaire à deux visions de l’homme très différentes, l’une tragique, l’autre optimiste. Pour Freud, notre moteur principal est le désir. Constamment confrontés à ses impasses, nous bricolons dans l’incurable, ce qui explique, entre autres, notre inventivité. Pour le Bouddha, notre essence réside dans une zone du psychisme qui est a-conflictuelle et qui peut être en quelque sorte « musclée » par la méditation. Cela nous permet d’atteindre une satisfaction stable et profonde.
– Celui qui a atteint la paix, en quoi est-il utile à l’humanité ?
– Votre question renvoie à l’histoire du bouddhisme. A l’origine, le but visé était uniquement la libération personnelle. Plus tard est apparu le souci collectif avec la figure du bodhisattva, le pratiquant qui, juste avant d’atteindre le Nirvana, y renonce pour se consacrer à la libération de son prochain. Publicité
– D’une certaine manière, on rejoint le christianisme ?
– Oui, d’une certaine manière.
– Mais si la plénitude est possible et qu’on sait comment y arriver, pourquoi tout le monde ne se précipite-t-il pas dans la méditation ?
– C’est la question des résistances à l’engagement. J’en vois plusieurs : la peur du changement d’abord, et aussi la crainte de manquer de manque, autrement dit la confusion entre force et tension. Notre ambivalence fondamentale également, et enfin notre besoin de punition : l’idée que le malaise comble une culpabilité inconsciente.
– Là, on repart dans la psychanalyse à fond la caisse…
– Indubitablement.
1. « Le bouddhisme au risque de la psychanalyse », d’Eric Vartzbed, Ed. Seuil, 197 p. 2. De Robert Pirsig, Ed. Seuil, réédité en 1998.
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| | | Dogiraudet Etudiant
Nombre de messages : 493 Age : 69 Localisation : région parisienne Date d'inscription : 18/03/2012
| Sujet: Re: FREUD ET LE BOUDDHA, LE FACE-À-FACE Jeu 30 Mar 2023 - 8:52 | |
| - Dogiraudet a écrit:
- Spoiler:
Un article intéressant sur ce sujet . Lien : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
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- les liens, illustrations, vidéos, etc. ne constituent pas une argumentation. Ils ne peuvent être postés sans résumé de leur contenu.
Veuillez adjoindre un résumé de l'article en question ou du moins un résumé significatif.
Sentinelle. Le texte entier : Freud et le Bouddha, le face-à-face Le psychanalyste lausannois Eric Vartzbed, ancien mécanicien et champion de motocross, se livre à une analyse comparée de deux voies très fréquentées dans la quête du bonheur. Un vrai délice d’intelligence et de liberté d’esprit. JPEG - 18.6 ko Eric Vartzbed. (Eddy Mottaz) Quels sont les points communs entre le zen et la psychanalyse ? On vous l’accorde, la question ne s’impose pas comme des plus urgentes. Pourtant, en lisant l’élégant ouvrage1 du psychothérapeute et psychanalyste lausannois Eric Vartzbed, on se rend compte qu’on se trouve au cœur d’une préoccupation très contemporaine – comment être heureux ? Et que le divan comme le bouddhisme sont des voies très fréquentées pour y répondre. Sur l’une et l’autre, Eric Vartzbed propose un regard plongeant extraordinairement éclairant, car il permet de discerner des ressorts qui demeurent, de trop près, invisibles. La prise de distance, le voyage, c’est toute l’affaire de ce jeune docteur de 37 ans, qui a commencé par être pilote de motocross avant d’effectuer un virage biographique radical. Et qui trouve merveilleusement les mots pour dire qu’il faut se méfier des mots. Le Temps : Un des livres cultes des années 70 s’intitule « Traité du zen et de l’entretien des motocyclettes » 2. Mais le lien entre le zen et la moto reste obscur. Vous qui avez été champion de motocross, vous allez enfin pouvoir nous éclairer ? Eric Vartzbed : Désolé ! La seule relation que je peux établir entre la moto et le bouddhisme est très personnelle, c’est l’idée de réincarnation : je peux dire que j’ai eu plusieurs vies ! (Il rit) Dans la première, j’ai fait de la moto, très tôt, dès 14 ans, pour faire comme mon grand frère. Puis comme mon père, qui était mécanicien. Ma première formation est un CFC de mécanicien. – Comment avez-vous viré psychanalyste ? – Certaines rencontres réorganisent l’existence. Je suis tombé amoureux. J’avais 17 ans, mon amie était gymnasienne, et son père un grand historien de l’art. Elle m’a déniaisé érotiquement, et lui intellectuellement. J’ai fait le gymnase du soir, puis un doctorat en psychologie sur les racines philosophiques de la psychanalyse. Mais, si je suis devenu psychanalyste, c’est aussi parce que j’ai eu personnellement besoin d’une cure et que j’en ai fait l’expérience. – Dans votre livre, vous parlez aussi du bouddhisme comme d’une « cure ». Est-ce cela qui vous a amené à vous y intéresser ? – Oui, je cherchais un point de vue extérieur sur ma discipline, pour éviter de réciter un catéchisme freudo-lacanien. L’aspect le plus intéressant du bouddhisme, à mon avis, est qu’il propose une méthode pour guérir la souffrance humaine. C’est une démarche très empirique, où il ne s’agit pas de croire, mais de faire des expériences. – Tout de même : la réincarnation, la spiritualité ? – Au cœur du bouddhisme, il y a la méditation. Face aux spéculations sur l’au-delà, le Bouddha répondait par un noble silence. – Le zen suppose de « renoncer au sacré », écrivez-vous : on est à l’opposé de la religion ? – Très loin, oui. Le chrétien traite sa souffrance par l’imaginaire et le sens, l’identification au Dieu incarné qui dépasse sa souffrance dans la résurrection. La thérapeutique bouddhiste propose au contraire de se dégager de tout sens, de toute croyance, de toute idéologie. De tout ce qui, en fait, relève de la représentation. L’idée est de libérer la perception, d’être simplement en contact avec ce qui est. C’est ce que j’appelle un scepticisme sensualiste. Finalement, on a davantage affaire à une hygiène qu’à une religion. C’est ma vision des choses bien sûr. Mais elle est étayée. Publicité – La quête de sens n’est-elle pas aussi au centre de la cure psychanalytique ? Qu’est-ce qui vous fait dire que la psychanalyse, comme le zen, vise à s’en détacher ? – Il y a des étapes dans une analyse. Mais le but est bien d’arriver à décoller de son fantasme, à se libérer de la croyance que l’on s’est forgée sur ce qu’il faut être, à ne plus être figé dans une représentation. Il y a des moments magnifiques dans une cure. Lorsque ce décollement opère, c’est un peu comme dans Les Ailes du désir, le film de Wim Wenders : on passe du noir et blanc à la couleur, le vivant circule à nouveau. La grande différence avec le zen, c’est que ce décollement s’opère ici grâce au langage plutôt que grâce à la méditation. – Ce qui n’empêche pas l’analyste de mettre fin, quand il le faut, au « bavardage mental »… – Oui, car on peut faire mousser indéfiniment la machine du sens. A un moment donné, l’analyste peut intervenir pour arrêter l’éternel jeu des questions et des réponses. Les réponses tautologiques du maître zen ont la même fonction. – Si je suis « zen », sans désir ni idéal, qu’est-ce qui fait que je me lève le matin ? – Vous avez raison, on ne peut pas vivre sans idéal. D’ailleurs, le zen surfe sur un paradoxe : il critique les idéaux mais il en constitue un lui-même. L’enjeu est probablement de vivre avec sans trop y adhérer. Dans les deux traditions, le malaise tient aux fixations. – Parlez-nous du bonheur selon le Bouddha et selon Freud. – On a affaire à deux visions de l’homme très différentes, l’une tragique, l’autre optimiste. Pour Freud, notre moteur principal est le désir. Constamment confrontés à ses impasses, nous bricolons dans l’incurable, ce qui explique, entre autres, notre inventivité. Pour le Bouddha, notre essence réside dans une zone du psychisme qui est a-conflictuelle et qui peut être en quelque sorte « musclée » par la méditation. Cela nous permet d’atteindre une satisfaction stable et profonde. – Celui qui a atteint la paix, en quoi est-il utile à l’humanité ? – Votre question renvoie à l’histoire du bouddhisme. A l’origine, le but visé était uniquement la libération personnelle. Plus tard est apparu le souci collectif avec la figure du bodhisattva, le pratiquant qui, juste avant d’atteindre le Nirvana, y renonce pour se consacrer à la libération de son prochain. Publicité – D’une certaine manière, on rejoint le christianisme ? – Oui, d’une certaine manière. – Mais si la plénitude est possible et qu’on sait comment y arriver, pourquoi tout le monde ne se précipite-t-il pas dans la méditation ? – C’est la question des résistances à l’engagement. J’en vois plusieurs : la peur du changement d’abord, et aussi la crainte de manquer de manque, autrement dit la confusion entre force et tension. Notre ambivalence fondamentale également, et enfin notre besoin de punition : l’idée que le malaise comble une culpabilité inconsciente. – Là, on repart dans la psychanalyse à fond la caisse… – Indubitablement. 1. « Le bouddhisme au risque de la psychanalyse », d’Eric Vartzbed, Ed. Seuil, 197 p. 2. De Robert Pirsig, Ed. Seuil, réédité en 1998. | |
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